LA GESTION DE L’EAU À LA CAHC (HÉNIN-CARVIN)

L’Agglo d’Hénin-Carvin vient de reconduire les délégations de service public (DSP) au privé (Véolia) de l’assainissement collectif et non collectif jusque 2027. Mais les contrats de production et de distribution de l’eau potable arrivent à échéance en 2022 et 2023. L’occasion d’une réflexion sur une gestion en régie ?

Dans son intervention au conseil communautaire, Marine Tondelier rappelle qu’une coopération entre les différentes Agglos du pôle métropolitain de l’Artois pourrait être établie en vue d’une gestion en régie:  CAHC + CALL (Lens-Liévin) + CABBALR (Béthune-Bruay). Cette dernière venant justement de décider la mise en place d’une gestion publique en régie de l’eau et de l’assainissement.

La mise en route d’une régie pourrait recevoir l’appui du regroupement des régies françaises « France Eau Publique », ainsi que l’expertise de spécialistes indépendants des cabinets privés  souvent sollicités par les dirigeants d’Agglos.

Ci dessous l’intervention de Marine Tondelier au conseil communautaire du 11 février 2021.

« L’état de l’eau sur notre territoire est au cœur de notre mission. Les services de la CAHC sont très vigilants pour que nous puissions continuer à boire une eau de qualité. Nous pouvons leur faire confiance et les remercions d’être aussi attentif.

Nous avons déjà discuté du mode de délégation de l’assainissement collectif, nous discuterons plus tard dans le mandat du mode de gestion de l’eau potable mais ce soir, c’est de la mise en place d’un contrat unique de délégation de service public (DSP) concernant le service public d’assainissement collectif, le service public d’assainissement non-collectif et du service public de gestion des eaux pluviales dont nous discutons.

Nous en avions déjà débattu en octobre. Et je suis heureuse que cette délibération nous donne l’opportunité de poursuivre la réflexion.

Le choix que nous faisons ici nous engage pour les 6 ans à venir. C’est l’occasion pour moi de revenir sur la défense du principe de la régie afin que chacun ici l’ait en tête lorsque nous aurons le débat sur le service d’eau potable.

Car le débat sur le mode de gestion n’est pas simplement une question technique et financière. C’est un choix éminemment politique. Nous en décidons

La tentative de prise de contrôle de Suez par Veolia est un risque majeur pour la qualité du service public. 

Les élus locaux ont massivement fait connaître leur crainte sur les conséquences de cette fusion. Nous savons tous ce que l’absence de concurrence dans le cadre d’une DSP conduit à une dégradation rapide du service. 

C’est au moins une bonne raison pour poursuivre cette réflexion. Mais ce n’est heureusement pas la seule. La gestion en régie n’est pas une fiction. C’est une hypothèse que nous devons garder à l’esprit, surtout si demain le service public devait se dégrader rapidement. De nombreuses collectivités comme la Métropole de Lille sont finalement arrivées à ce constat. 

Les conditions favorables que nous avons connues ces 10 dernières années ne vont peut-être plus exister les 10 prochaines années.  Il va falloir l’anticiper.

La CAHC a souhaité être accompagnée par un Assistant à Maîtrise d’Ouvrage (AMO) afin d’analyser les différents modes de gestion possibles sur le territoire et de nous aider à la décision pour choisir le plus adapté pour chaque service.

On y retrouve l’argumentation classique des cabinets d’expertise (AMO), souvent proches du privé, et qui, c’est le moins que l’on puisse dire, n’ont pas l’habitude de pousser à une gestion en régie.

En effet, on fait dire ce que l’on veut aux grilles de comparaison entre les différents types de gestion. Si on recherche la tranquillité (pas de risques – ne pas avoir à bâtir une régie) on choisira une DSP, surtout que Véolia est déjà en place et qu’il a de forte chance de remporter un éventuel appel d’offre. Mais si on met en avant la transparence totale, la simplicité dans les décisions puisque les services techniques sont sous la main, l’absence de bénéfices, la participation des usagers, etc : on choisit une régie.

Des pistes en faveur de la régie n’ont d’ailleurs pas été étudiées par le rapport: une coopération pourrait notamment s’établir entre les communautés du pôle métropolitain de l’Artois. La CALL et Béthune-Bruay sont juste à côté, et la CABBALR vient justement de décider de mettre en place une régie, une expérience qui peut être utile. Des problèmes d’échelle peuvent donc être résolus à court ou moyen terme.

Les communautés ne sont par ailleurs pas seules face à la mise en place d’une régie: France Eau Publique regroupe les plus importantes communautés en régie et peut fournir de l’aide. Ces coopérations permettent de contrecarrer l’argument « mutualisation des moyens » favorable à Véolia.

Pour garantir la préservation d’un bien commun, nous devons collectivement assurer le meilleur contrôle du meilleur service rendu. Et c’est en régie que ce service est mieux contrôlé !

Pour finir, puisqu’en réalité, concernant l’assainissement, le choix de la DSP a déjà été avec le futur délégataire :

 Je voulais attirer votre attention sur deux points à négocier avec le futur délégataire. La « part délégataire » parait à ce jour élevée et pourrait, j’en suis sure, donner lieu à une renégociation plus avantageuse ;

La participation des usagers est à ce jour quasiment inexistante. Cela pourrait être discuter avec le prochain délégataire. En 2012 par exemple, suite à des manifestations d’usagers réclamant une étude de retour en régie, la CALL avait accordé la création d’un observatoire de l’eau avec participation de représentants d’usagers, avec une réunion minimum/an. Cette clause, bien que partiellement respectée, avait été inscrite au contrat. C’est à mon avis une bonne idée à reprendre et à appliquer. Je suis sure qu’elle recevra un accueil favorable dans cette assemblée ! »